Vincent Peillon a répondu ce matin aux questions du Télégramme de Brest
Le Télégramme - L'écart constaté par les sondages entre les listes UMP (28% d'intentions de vote) et celles du PS (21%) vous inquiète-t-il?
Non. Ce qui m'inquiétait, jusqu'à ces derniers jours, c'était que l'on ne puisse pas mener la campagne européenne que l'on doit aux Français. J'ai aujourd'hui le sentiment que les choses bougent dans le bon sens.
Comment pensez-vous rattraper votre retard sur les listes de la majorité?
J'observe d'abord que l'Union de la majorité se situe au mieux à 28%. Toutes les autres listes se positionnent contre le gouvernement actuel. Elles recueilleraient ainsi plus de 70% des suffrages. Ce qu'on lit aujourd'hui dans les sondages, c'est un désaveu de l'UMP et de Nicolas Sarkozy. Je pense ensuite que le mode de scrutin et aussi l'impossibilité, jusqu'à maintenant, de faire campagne n'ont pas permis d'exposer aux Français - c'est d'ailleurs la stratégie de Sarkozy - les enjeux de cette campagne. L'UMP dit exactement le contraire de ce qu'elle a fait au Parlement européen au cours des cinq dernières années. On le voit, par exemple, à propos de la recherche ou des services publics. Ils ne refusent pas seulement le débat, ils mentent aussi sur la nature de leur projet. Or, cette élection fait apparaître deux orientations européennes tout à fait différentes. L'enjeu de ce scrutin est donc de montrer qu'il existe une alternative à la politique européenne de Nicolas Sarkozy. Et seuls les socialistes sont porteurs de cette alternative.
François Bayrou est désormais désigné comme le meilleur opposant à Nicolas Sarkozy. Le président du MoDem n'est-il pas en train de devenir le caillou dans la chaussure des socialistes?
On assiste à un phénomène médiatique intéressant. Monsieur Bayrou fait la tournée des médias en se contentant de dénoncer Nicolas Sarkozy et tout le monde trouve cela très bien. J'ajoute que l'on voit aujourd'hui comment le parti au pouvoir instrumentalise tous les votes anti-sarkozystes contre le PS. Cela devrait mettre la puce à l'oreille des électeurs. Il est, en effet, curieux que tous ces gens qui prétendent s'opposer au président de la République cherchent à tailler des croupières au principal parti de l'opposition... François Bayrou, malgré mes demandes incessantes de clarification, continue de siéger avec les libéraux au parlement européen. Que les électeurs ne s'y trompent pas, le 7juin, il faut voter utile car celui qui est tenté de voter pour les petits partis risque contre son intention de conforter Nicolas Sarkozy et la droite.
Les socialistes reprochent à François Bayrou de confondre les européennes avec le premier tour de la présidentielle de 2012. Votre parti n'est-il pas affecté du même travers quand tant de dirigeants socialistes se bousculent déjà au portillon de la candidature élyséenne?
Je pense qu'il faut faire très attention au mélange des genres. Je crois qu'il faut profiter de ce moment européen pour parler d'Europe et ne pas céder aux sollicitations médiatiques qui poussent quelques-uns à se positionner en vue de l'échéance encore lointaine de 2012. Le scrutin du 7juin doit être l'occasion de trancher entre deux orientations européennes. Quand on regarde les projets, il y a bien deux politiques européennes antagonistes. On a, d'un côté, les socialistes qui veulent une Europe puissance, dotée d'un budget, capable de lever l'emprunt pour favoriser la sortie de crise, une Europe plus ouverte sur le monde. De l'autre côté, on a le projet d'une Europe a minima. Nicolas Sarkozy dit par exemple clairement que le social n'est pas une question européenne. Il s'agit bien d'une confrontation de deux conceptions différentes de la construction européenne. Il faut donc que nous ayons sereinement ce débat devant les Français. Et tous ceux qui détournent le sens de cette élection européenne ont tort de le faire.
Propos recueillis par Philippe Reinhard
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