Vincent Peillon crée l'événement de la rentrée socialiste avec deux journées de réflexion à Marseille, les 21 et 22 août. Il s'explique cette semaine dans Paris Match.
Paris Match : Vos journées de Marseille sont-elles un autre la Rochelle? Une dissidence ? On dirait que vous avez tenu à devancer tout le monde, même la rituelle Fête de la Rose de Montebourg du 23 août…
Vincent Peillon : Evidemment non ! Nombreux sont ceux – militants, syndicalistes ou intellectuels – qui, après le Congrès de Reims, les européennes et les épisodes de juillet , avaient envie d’un rassemblement de cette nature, consacré à la réflexion, fraternel, ouvert, tourné vers l’avenir. Nous ne prétendons pas non plus concurrencer une fête de la Rose créée il y a vingt-cinq ans en Saône-et-Loire par Pierre Joxe et dont Arnaud a fait, avec son talent, une institution !
Paris Match : Comment interprétez-vous les quelques défections que vous enregistrez ? Celles de Stéphane Le Foll par exemple, proche de François Hollande, ou d’Arnaud Montebourg, chargé de la « rénovation » au sein de la direction?
Pourquoi voulez-vous que j’interprète ? Nous ne nous réunissons pas à Marseille pour compter les présents et les absents, mais pour parler de toutes les réformes de structures qui ne sont toujours pas faites et qui vont conduire, en 2012, à une France très endettée, avec des injustices aggravées et des services publics, l’école, l’université, l’hôpital, toujours plus attaqués. Il faut des réformes très profondes, comme celle que je propose pour l’Education nationale dans le livre d’entretiens que je publie avec Xavier Darcos (*), ou celles dont nous allons débattre - sur les retraites, la fiscalité, les médias ou les collectivités locales.
Paris Match : Vous faites une large place aux auteurs du rapport sur les primaires, remis en juin à Martine Aubry, qui ne semble pas pressée de lui donner une suite. Vous lancez le débat ?
Il faut des primaires ouvertes, c’était au cœur de notre motion au congrès de Reims. Qu’Arnaud Montebourg en ait fait l’élément central de la mission qui lui a été confiée par Martine Aubry sur la rénovation, c’est une bonne chose. Pierre Moscovici lui-même avait proposé, il y a quelques semaines, de lancer une pétition militante. Olivier Ferrand sera là pour en parler, il a fait un travail remarquable. C’est un instrument essentiel pour la gauche, qui a besoin d’associer les citoyens, d’une société mobilisée, avant l’élection et aussi après, quant il faut agir. Regardez les résistances auxquelles se heurte déjà Obama !
Paris Match : De Robert Hue à Marielle de Sarnez, l’écart n’est-il pas un peu trop grand entre vos invités?
Je ne le crois pas, et il est moins grand que celui qui existe entre les ministres de la majorité Sarkozyste ! Sur l’essentiel, il faut se parler, et que toutes les forces progressistes fassent cette démarche de réfléchir ensemble à une alternative politique en 2012. Nous avons besoin d’une large refondation républicaine. Elle doit associer tous ceux qui ont une autre vision de la France, de son identité, de son avenir.
Paris Match : N’est-ce pas utopique, lorsqu’on voit la fin de non recevoir reçue par Martine Aubry à ses avances faites aux Verts et aux Radicaux ?
Daniel Cohn-Bendit sera là. Christiane Taubira nous fait ce plaisir aussi. Marielle de Sarnez, Robert Hue…Et d’autres encore ! Les alliances n’ont jamais été simples. Il faut se souvenir du long processus mené par François Mitterrand vis-à-vis de la SFIO ou des difficultés des Assises de la transformation sociale en 1993. C’est une alchimie à faire et refaire sans cesse… Avec un nouvel acteur aujourd’hui, le MoDem, que l’on ne peut pas ignorer. Si l’on ne veut pas perdre, il faut se rassembler. Quitter le terrain fangeux des petites phrases et des personnes pour construire ensemble une stratégie de réformes justes pour notre pays.
Propos recueillis par Sylvie Santini.
* « Peut-on améliorer l’école sans dépenser plus ? », Ed. Magnard.